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La douleur, un phénomène complexe

La douleur est un phénomène complexe : c’est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, agissant comme un système de protection (chien de garde pour nous protéger des dangers extérieurs). Lorsqu’on met la main sur une plaque chaude, on retire immédiatement la main. Comment cela marche ? Le système de protection entre en marche et se traduit par de la douleur, ainsi on retire notre main. Le rôle de la douleur est donc de modifier notre comportement afin de nous protéger et permettre au corps de guérir.

La douleur, comment ça marche ? La peau, les muscles, les articulations, les ligaments, chaque tissus du corps en somme possèdent des nocicepteurs. Un nocicepteur est un récepteur sensoriel de la douleur qui fait naître un message nerveux lorsqu’il est stimulé, ce message passe d'abord par la moelle épinière avant d'être relayé jusqu’au cerveau où il sera interprété comme une douleur.

Prenons l’exemple d’un épisode douloureux récent au niveau du bas du dos (appelée lumbago), notre comportement va changer ; nous allons éviter certains mouvements et cela va permettre au dos de guérir. Normalement, la douleur s’atténue petit à petit jusqu’à disparaître. Mais certaines fois, ce système de protection peut devenir trop sensible, et perpétuer des messages de protection (douleur), alors que le corps n’a plus besoin de cette protection. Les recherches en neurosciences ont permis de mettre en lumière un certain nombre de raisons qui expliquent pourquoi ce système de protection peut devenir trop sensible.

Comment et pourquoi ? On sait que le système nerveux se modifie avec les expériences (neuroplasticité). Donc, plus on a mal longtemps, plus le système nerveux « apprend » et devient sensible ; on parle de mémoire de la douleur. En somme, le système de protection (= la douleur) est influencé par les facteurs cités ci-dessous :

  • la situation dans laquelle survient la douleur
  • les expériences douloureuses antérieures
  • la peurs
  • les émotions
  • l’humeur
  • les attitudes face à la douleur (mythe, croyance, sédentarité)
  • les habitudes de vie (tabac, obésité)
  • les facteurs génétiques

Concernant le mal de dos, le cerveau va donc « apprendre » certaines situations ou mouvements qui provoquent des réactions de protection, et petit à petit, ces situations vont suffire à provoquer des douleurs alors que le dos n’est pas blessé. Si un thérapeute vous conseille « Ne vous penchez pas en avant, vous allez vous faire mal au dos », le système de protection sera encore en alerte. Le patient va penser que son dos est fragile et vulnérable et il limitera ses mouvements ; la capacité du dos à tolérer les efforts diminuera, les muscles et les articulations ne seront plus habituer à supporter les contraintes et les charges et le niveau de douleur se maintiendra.

Ces réactions du corps sont tout à fait inconscientes, et la douleur perçue est bien réelle. En effet, les modifications du système nerveux (augmentation de la sensibilité) ont été objectivées au niveau de la moelle épinière et du cerveau de personnes souffrant de douleurs de dos depuis longtemps (Wand et al., 2011). Même si ces douleurs ne reflètent plus l’état du dos, elles sont bien réelles !

Le patient souffrant d’un lumbago devra au début éviter les mouvements et activités qui lui augmente sa douleur. En effet, le repos est préconisé les 2-3 premiers jours (cf « Le mouvement pour soigner son mal de dos« ). Par la suite, le sujet devra effectuer tout types d’activités et mouvements (et même ceux qui lui provoquaient la douleur) pour éviter que le système de protection se perpétue et que la douleur soit encore présente. Il est impératif de « bouger » pour se soigner et ainsi éviter que la douleur se chronicise.

 

Voici quelques exemples de mythes, de croyances qui entretiennent le système de protection :

  • LA POSTURE :

« Tiens toi droit sinon tu vas avoir mal au dos ! ». Est-ce qu’il est sincèrement possible de se tenir droit 15 à 16 heures dans une journée ? Des conseils de posture, ça fait 30 ans qu’on en entend, 30 ans qu’on a aucun résultat ; en effet, il y a toujours autant de lombalgies et de cervicalgies.

En réalité, la meilleure posture est celle que tu ne garderas jamais trop longtemps, c’est celle qui change régulièrement. N’importe quelle position est coûteuse en énergie sur le long terme : se pencher en avant ou bien se tenir droit au bout d’une demi-heure provoquera des douleurs (les articulations et les muscles seront tiraillés). L’idée, c’est que l’on doit varier les postures pour éviter les douleurs. On a tendance à dire qu’il faudrait éviter de garder la même posture plus de 15 min. Rappelons que bouger est antalgique ! La bonne posture, c’est la prochaine !

Prenons un cas concret, concernant les personnes assisent au travail. La solution ? Varier les postions ! 15-30 minutes assis, 15-30 minutes debout, 5 minutes de marche, 15-30 minutes sur un medecine ball. Bref, laissez place à votre imagination.

 

  • SOULEVER UN OBJET EN ÉTANT PENCHÉ EN AVANT :

Soulever une charge le dos arrondi n’augmente pas le risque de dégénérescence discale, la survenue d’hernie discale ou encore l’apparition d’arthrose (Battié et al., 2009). C’est la croyance d’une douleur certaine de se pencher en avant qui crée la douleur à l’action. Le dos est fait pour bouger dans tous les sens. En clair, se pencher avant n’est pas mauvais pour le dos tant qu’on reste dans nos capacités, sinon il faut s’entrainer*. Comment ? Soulever les charges progressivement !

*On ne fait pas un marathon au bout de 2 semaines de footing…au bout de 6 mois d’entrainement, c’est la clef et c’est vrai pour le dos aussi.

 

  • MON GENOU CRAQUE :

Une articulation qui craque est un processus physiologique normal. Le bruit entendu provient d’un phénomène appelé de cavitation. En fait, la plupart des gens asymptomatiques ont les genoux, les épaules, les vertèbres qui craquent. Ces bruits peuvent inquiéter mais en aucun cas cela signifie l’apparition d’arthrose ou autre trouble orthopédique. En cas de douleur, consultez un thérapeute.

 

  • DOS CAMBRÉ :

La cambrure ou lordose lombaire varie de 30° à 80° chez l’être humain, autant dire que c’est très disparate. Les personnes « cambrées » n’ont pas plus mal au dos que celles qui le sont moins (Been et al., 2014). Il n’existe pas deux individus avec les mêmes courbures.

 

  • NERF COINCÉ, VERTEBRE DEPLACÉ :

« J’ai mal dans le bas du dos, je dois avoir une vertèbre de déplacée » : la plupart des gens pensent que la douleur provient d’une vertèbre déplacée, et que lorsque l’ostéopathe l’a fait craqué, cette dernière s’est remise à sa place. L’ostéopathe ne remet rien en place, encore moins une vertèbre. L’ostéopathe redonne de la mobilité, de l’élasticité à la vertèbre afin de récupérer la fonction de cette dernière et de diminuer la douleur.

De nombreuses personnes sont convaincues (croyance) que le craquement qui se fait entendre lors d’une manipulation est le signe que le dos a été remis en place. L’impression d’avoir une vertèbre bloquée ou déplacée vient du fait qu’il y a des muscles contracturés, tendus, qui empêchent cette vertèbre de bouger normalement. Le crac va agir avant sur la musculature afin de la libérer de ses tensions et dès lors, améliorer la mobilité vertébrale.

Aucune vertèbre ne se déplace sauf accident grave (accident de voiture par exemple). Le « déplacement » d’une vertèbre est une urgence médicale (traitement chirurgical) avec le risque d’une section de la moelle épinière.

 

« J’ai mal à la nuque, j’ai un nerf de coincé » : un nerf ne se coince pas entre deux vertèbres, il peut être irrité par une trouble discal ou bien arthrosique provoquant des troubles moteurs, sensitifs et des picotements le long du trajet du nerf. La douleur, quant à elle, est due à l’inflammation que provoque l’irritation du nerf. L’ostéopathe, de par ses techniques, aura pour objectif de diminuer cette inflammation et donc de calmer la douleur.

 

Bien que plusieurs de nos patients vont nous dire qu’ils ont un disque de déplacé, un nerf pincé ou coincé et/ou une vertèbre de déplacée, il s’agit plutôt d’une façon d’expliquer ses symptômes. Mais d’un point de vue médical, ces termes employés à tord ne sont plus d’actualités, ils ne représentent pas la réalité. L’intérêt ici d’un langage orthopédique correcte est une compréhension et une collaboration seine et pérenne entre l’ostéopathe et le corps médical.

 

  • L’IMAGERIE MÉDICALE :

La corrélation clinico-radiologique est mauvaise pour les douleurs du dos. Beaucoup de gens ont des douleurs au dos sans aucune lésion à l’imagerie et vice-versa. Réaliser une IRM est donc dans la plupart du temps inutile et se montre anxiogène pour la plupart des patients. En effet, la découverte fortuite de pathologies décrites (arthrose, protrusion discale, dégénérescence discale) sur les rapports d’IRM ainsi que la mauvaise corrélation clinico-radiologique sur les maux de dos ont un effet nocebo (aggravation des symptômes) sur les patients.

Pour rappel : à 30 ans, 52% des individus qui n’ont pas mal ont un remaniement des disques intervertébraux. A 80 ans, 83% des individus qui n’ont pas mal ont de l’arthrose vertébrale (Bedson et al., 2008). Après 50 ans, une personne sur deux à une hernie discale sans douleur. On a tous un « petit quelque chose » à l’imagerie médicale.

Prenons un patient chez qui on va découvrir de l’arthrose (sans qu’il ne le sache auparavant) et sans qu’il n’en souffre. Le patient pensera que son dos est fragile, ne l’utilisera pas à bon escient, déconditionnera sa musculature du dos et sera plus à même de se blesser à la moindre contrainte.

Pour plus d’informations, cliquez sur l’article suivant « Dois-je passer une IRM (ou tout autre examen complémentaire) lors d’un mal de dos ? »

 

Conclusion :

La douleur n’est pas toujours synonyme d’une blessure au dos, elle peut être multifactorielle. Le rôle du thérapeute est de déceler, chez les patients, le facteur mécanique pouvant être la cause de la douleur mais aussi la multitude de facteurs pouvant l’influencer. C’est une première étape pour trouver des solutions et agir.

Le dos est victime de croyances infondées, qui se révèlent délétère pour les individus : peur de bouger, faire toujours très attention…

De plus, savoir qu’une augmentation de douleur n’est pas, dans la plupart des situations, un reflet d’une aggravation de l’état du dos devrait permettre d’agir de manière plus efficace sur son dos. En effet, avec ces connaissances, cela autorise à recommencer à bouger plus vite. Cela permet aussi de refaire certaines activités avec des niveaux modérés de douleur, en sachant que cela ne va pas aggraver la situation du dos.

N’oubliez pas, le meilleur moyen de se soigner est de rester actif tout en écoutant son corps et sa tolérance à la douleur.

 

Sources :

  • Wand, B., Parkitny, L., O’Connell, N. E., Luomajoki, H., McAuley, J. H., Thacker, M., & Moseley, G. L. (2011). Cortical changes in chronic low back pain: current state of the art and implications for clinical practice. Manual therapy16(1), 15‑20.
  • Bedson, J., & Croft, P. R. (2008). The discordance between clinical and radiographic knee osteoarthritis: a systematic search and summary of the literature. BMC musculoskeletal disorders, 9(1), 116.
  • Battie MC , Videman T , Levalahti E , Gill K , Kaprio J . Effets génétiques et environnementaux sur la dégénérescence discale par phénotype et niveau de la colonne vertébrale: une étude multivariée de jumeaux . Spine 2008 ; 33 : 280 – 8.
  • Been E, Kalichman L. lordose lombaire. Spine J. 2014; 14: 87–97.