Les douleurs communes d’épaule sont un motif fréquent de consultation, elles se présentent souvent comme des douleurs tendineuses. Des lésions dégénératives sont habituellement fréquentes et bien visualisées à l’imagerie médicale. On parle alors de tendinopathies, de conflit sous-acromial… L’article, ici, insiste sur un point mal connu, l’importance du facteur cervical dans le mécanisme de ces douleurs d’épaule et l’intérêt majeur d’un traitement cervical chez ces patients, lorsqu’il est possible.
En effet, 60 à 70% des douleurs d’épaule ont une origine cervicale ; ces pseudo-tendinopathies sont les conséquences de l’irritation de la branche antérieure d’un nerf rachidien émergeant de la colonne cervicale. Fréquemment, ce « coincement » est dû à un trouble fonctionnel (un dérangement douloureux intervertébral mineur « DDIM ») entre la cinquième et la sixième vertèbre cervicale mais aussi à un trouble lésionnel (névralgie cervico-brachial par une hernie discale ou bien une discopathie) de ce même étage inter-vertébral.
On y retrouve à l’examen : des douleurs tendineuses (= tendinalgies) le plus souvent du muscle supra-épineux ou encore biceps brachial (la palpation des tendons est douloureuse, la contraction isométrique de ces muscles peut l’être également), des cordons myalgiques (= noeuds musculaires) dans les muscles cités dernièrement, un épaississement et une douleur au pli cutané de l’épaule (appelée cellulalgie). L’épaule de manière générale peut même être limitée dans ses mouvements.
C’est la souffrance à l’examen segmentaire codifié des étages vertébraux C4-C5 ou C5-C6 qui sera en faveur d’une origine cervicale. Cette souffrance est majoritairement du temps conséquence d’un DDIM et parfois d’une poussée inflammatoire d’arthrose. En cas de DDIM, aucune lésion à l’imagerie médicale n’est présente. Il est intéressant de noter que le patient ne souffre généralement pas de la nuque, mais uniquement de ses articulations zygapophysaires à la palpation.
Avant d’en arriver à ce diagnostic orthopédique médical, l’ostéopathe se doit d’avoir écarter toutes autres pathologies : le praticien interroge rigoureusement le patient sur l’histoire de sa plainte, ses antécédents et son traitement médicamenteux en cours. Un examen neuro-vasculaire puis orthopédique APPROFONDI ET RIGOUREUX de l’épaule sont appliqués : étude des mouvements actifs et passifs, recherche de passages douloureux, études des mouvements contre résistance, palpation des plans cutanés/musculaires et tendineux, sans oublier l’examen des articulations acromio-claviculaire et sterno-claviculaire… Un examen neuro-vasculaire et orthopédique de la région cervicale sont également réalisés. Il est important ici d’exclure toute pathologie d’épaule d’origine orthopédique, tumorale, infectieuse, inflammatoire ou métabolique.
Attention, une étude de 2020 révèle que les pathologies de l'épaule et celles de la colonne cervicale peuvent coexister et se chevaucher (50%)! On retrouve principalement des radiculopathies cervicales mêlées à des conflits sous-acromiaux. D'où l'importance d'une corrélation solide entre l'anamnèse (l'interrogatoire), l'examen clinique orthopédique et l'imagerie médicale afin de trouver LA CAUSE des douleurs, le diagnostic médicale afin d'avoir le traitement le plus efficient.
Qu’en est-il du traitement ostéopathique ?
Lorsque le rachis cervical est en cause, la manipulation vertébrale sur l’étage correspondant (quand elle s’avère possible !) fait partie d’un des traitements de premier choix ; le soulagement est généralement immédiat. En effet, les douleurs tendineuses ainsi que les mouvements douloureux de l’épaule sont atténués. En cas de douleurs plus tenaces, une séance supplémentaire apporte un apaisement complet et durable.
Les infiltrations sur l’articulation, des mobilisations articulaires ainsi que des étirements musculaires peuvent diminuer les symptômes. Les traitements médicamenteux (anti-inflammatoire, anti-douleur) réduisent les douleurs mais ne traiteront pas la cause.
En conclusion, que retenir ?
Il est important et fortement conseillé d’investiguer la région cervicale en cas de douleurs d’épaule pour éviter toute erreur diagnostic ! C’est bien ça en ostéopathie une prise en charge dans la globalité, non ?
Sources :
- Overlapping, Masquerading, and Causative Cervical Spine and Shoulder Pathology: A Systematic Review. Global spine J. 2020 Apr; 10(2):195-208.
- Zhang AL, Theologis AA, Tay B, Feeley BT. L’association entre la pathologie de la colonne cervicale et le dysfonctionnement de la coiffe des rotateurs. Journal of Spinal Disorders & Techniques. 2015; 28 : E206 – E211.
- Maigne R. Douleur d’origine vertébrale. Paris : Robert Laffont ; 2006.